Sixième visite : La théorie des cas




  Protase

6.0. Protase


Nous avons maintenant un modèle plus raffiné nous aidant à représenter la structure d'une phrase en français et dans d'autres langues. La théorie X-barre nous permet de plus de rendre compte de plusieurs des propriétés des structures phrastiques du français.

Nous devons maintenant nous concentrer sur le matériau et commencer à étudier ses propriétés. Nous nous posons toujours les mêmes questions: Quelles sont les propriétés des éléments qui constituent une phrase ? Pourquoi certaines phrases sont-elles agrammaticales ? Peut-on formaliser ces propriétés de façon à expliquer ce qui est grammatical et ce qui ne l'est pas ? Ces questions sont importantes à cause du but que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire de fabriquer un modèle de la grammaire du français qui puisse générer toutes et seulement les phrases grammaticales du français.

Dans une langue comme le français, les relations qu'entretiennent les éléments dans une phrase sont marquées en partie par l'ordre particulier des éléments. Par exemple, je sais que dans la phrase suivante :

    Sophie adore Amanda.

Sophie est le sujet et Amanda est l'objet direct. Ceci semble être donné par la position qu'occupe chacun des N''. Comme preuve de ceci, si je modifie l'ordre, je modifie par le fait même les relations qui existent entre les éléments. Donc, dans :

    Amanda adore Sophie.

Sophie n'est plus le sujet et Amanda n'est plus l'objet direct; nous avons le contraire.



 Latin
Par contre, dans beaucoup d'autres langues, ce n'est pas nécessairement la position qu'occupe un élément qui indique sa fonction dans la phrase. En  latin, par exemple, ceci est accompli à l'aide d'un procédé morphologique de sorte qu'un N a une forme différente suivant la fonction qu'il joue dans la phrase.

On dit en général que les langues qui fonctionnent suivant ce système sont des langues à cas. Un N dans une phrase possède un cas particulier déterminé par la fonction qu'il occupe. On comprend donc que dans les langues de ce type, le N'' peut être mis presque n'importe où dans la phrase puisque, peu importe sa position, nous savons quelle fonction il joue. Si nous travaillions à partir du latin, il faudrait inclure dans notre grammaire un mécanisme qui permet aux N d'obtenir leur cas.


 pronoms personnels
Pour le français, ceci ne semble pas nécessaire à première vue puisque les Noms ne sont pas marqués morphologiquement pour le cas. En fait, on peut démontrer que cette constatation n'est pas tout à fait juste et que le français possède certains éléments nominaux, comme les  pronoms personnels, qui sont marqués


 distribution
morphologiquement pour le cas. De plus, on peut démontrer qu'un mécanisme d'assignation de cas est nécessaire en français pour expliquer certains faits importants quant à la  distribution des N'' dans la phrase.

       


 modèle
 composante

Il faudra donc conclure que la grammaire du français représentée par notre  modèle, comporte  composante ayant pour charge de gérer le fonctionnement des cas; c'est la théorie des cas. Elle se résume à la condition suivante.

    Condition des cas : Un N'' doit avoir un cas.

Disons de plus, jusqu'à preuve du contraire, que cette condition fait partie de la grammaire du français et des autres langues naturelles. Dans une langue comme le français les cas sont assignés par le Temps, les verbes et les prépositions seulement. Donc, dans :

 sujet 
 objet direct 
 comp. de la préposition





    - Jean mange : Le sujet de I'' reçoit un cas du Temps.
    - manger une pomme : L'objet direct reçoit un cas de V.
    - dans la maison : Le complément de la préposition reçoit un cas de P.



© Yves Roberge, Université de Toronto, 1996
Mise en page : Henriette Gezundhajt




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