5.3. X-barre appliquée à Ph


 quantificateur

Il est généralement facile d'adapter une règle de réécriture à la théorie X-barre mais ceci est beaucoup moins évident pour ce qui est de la phrase elle-même, i.e. Ph. Considérons l'ancienne règle de réécriture pour Ph :

            Ph --> SN SV

La question qui se pose est de déterminer la tête de Ph. Cela pourrait être une projection de V (la tête de SV) ou une projection du N (la tête du SN sujet). Une autre option est celle qui est normalement adoptée. Pour appuyer ce choix nous pouvons faire les observations suivantes.

Premièrement, il existe un phénomène très important en français, comme dans beaucoup d'autres langues, et dont nous devons rendre compte, c'est l'accord entre le sujet et le verbe. Ce qui semble se produire dans la phrase suivante:

    Nous aimons les pommes.

c'est que le verbe "sait" à quelle personne et nombre est le sujet de façon à pouvoir se conjuguer de façon appropriée. Notre règle de réécriture ne nous permet pas de rendre compte de ce fait. Il serait donc utile de postuler l'existence d'un noeud entre le SV et le SN et qui permettrait d'établir le lien qui existe entre ces deux syntagmes, lien qui est reflété dans l'accord morphologique.

Deuxièmement, on peut observer des différences dans le comportement des verbes à l'infinitif et des verbes conjugués. Les deux diffèrent dans la position qu'ils occupent en rapport avec les marques de négation, certains adverbes et  quantificateurs :

  flexion


    Jean voudrait tous les rencontrer.
    Jean les rencontre tous.
    Jean les a tous rencontrés.
    * Jean tous les rencontre.

    Marie dit souvent en avoir mangé.
    Marie en mange souvent.
    Marie en a souvent mangé.
    * Marie souvent en a mangé.

    On m'a dit de ne pas partir.
    Il ne part pas.
    Il n'est pas parti.
    * Il ne pas part.

Nous avons donc les schémas généraux suivants :

    tous - Vinfinitif 
    Vtensé - tous
    Auxtensé - tous - Vparticipe passé
    * tous - Vtensé

    souvent - Vinfinitif
    Vtensé - souvent
    Auxtensé - souvent - Vparticipe passé
    * souvent - Vtensé

    pas - Vinfinitif
    Vtensé - pas
    Auxtensé - pas - Vparticipe passé
    * pas - Vtensé

Ou, encore plus simplement :

    {tous, souvent, pas} > Vnon-tensé

    Vtensé > {tous, souvent, pas}

Il nous faut rendre compte de ceci mais, encore une fois, rien ne nous permet de le faire dans notre ancienne règle de réécriture pour Ph.

Proposons l'existence d'un noeud intermédiaire entre le SN et le SV. Ce noeud contient les renseignements nécessaires à la conjugaison du verbe : l'accord (ACC) et le temps (T). Nous appelons ce noeud INFL ou I, pour Inflexion (= flexion).




Nous avons donc :

    Ph --> SN I SV
    I --> ACC T

               

Nous pouvons maintenant adapter cette règle à la théorie X-barre en proposant que la phrase est une projection maximale de I et donc que sa tête est I.

    I'' --> N'' I'
    I' --> I V''

        

Cette structure nous permet de rendre compte de la position relative de la négation (pas), d'adverbes comme souvent et de quantificateurs du type de tous puisqu'on peut postuler que le verbe doit se déplacer vers I s'il doit être tensé et ce de façon à ce qu'il puisse recevoir les terminaisons nécessaires à sa conjugaison. Lorsque le verbe demeure sous sa forme non-tensée, il n'a pas besoin de se déplacer sous I.

Si on suppose que la négation, les adverbes et les quantifieurs se trouvent dans la position indiquée ici,


Le verbe qui monte vers I (un verbe tensé) précédera ces éléments alors qu'un verbe qui demeure dans sa position de base sous V'' les suivra.




LA THÉORIE
X-barre